Bruno FORTIN [AUTEUR]

2 UNE PAUSE, UN CAFE

Une pause, un café

   C’était au mois de juillet, un mardi je crois, en milieu de matinée vers les dix heures, j’avais l’habitude de prendre un petit expresso avec un croissant pendant ma pause au café de la Mairie à 100 mètres de mon lieu de travail. Et comme à l’accoutumée j’étais perdu dans mes pensées, étant d’un naturel un tantinet rêveur. Comment pouvais-je savoir que ma vie allait radicalement changer du tout au tout dans les minutes qui allaient suivre ?

 

   Une jolie femme, très séduisante et très sexy d’environ vingt-six à vingt-huit ans que je n’avais jamais vue auparavant poussa la porte de l’établissement, elle monopolisa toute mon attention. Séduit par la grâce féline de ses gestes, je m’extasiais devant la finesse de sa taille qui s'évasait en corolle. Mon regard s’était perdu dans son décolleté, plaisir incommensurable pour un homme avide de sensations et là, une très belle occasion s’offrait à mes yeux. Son parfum à la fois prononcé, rare, ambré et subtil, une odeur aphrodisiaque, enivrante et remplie de mystère flottait dans l’air me faisait ressentir un très vif plaisir d’être en si bonne compagnie dès le matin. Pour agrémenter le tout, le soleil était de la partie, brillant de ses mille feux et m’enveloppant de sa douce chaleur à travers la vitre. Mon esprit était en proie de sensations troublantes. Son corps de femme n'était que séduction, elle en était indiscutablement une virtuose dans ce domaine.

 

[Ma petite voix intérieure qui n’arrêtait pas une seule seconde de m’inonder de ses commentaires à tout va, en la voyant, elle était soudainement devenue muette, mais cela n’allait pas durer, je la connaissais trop bien].

 

   Elle s’était assise à la table en face de la mienne, attiré par son feeling, sa classe, ses yeux d’un bleu pastel, très légèrement maquillés, pétillants de malice, son regard était un défi permanent auquel je ne pouvais opposer aucune résistance et enfin sa longue et superbe chevelure blonde d’une beauté vénitienne magnifiquement coiffée. Son image était sublime, un véritable ravissement pour les yeux, pour les miens en tout cas, j’étais littéralement hypnotisé. Je la scrutais intensément des pieds à la tête, le regard brillant d’une émotion palpable.

 

   Elle était revêtue pour le haut d’un tee-shirt décoré de dentelle, très décolleté, sans rien en montrer, laissant deviner une poitrine dotée de magnifiques petits seins dont on pouvait apercevoir la pointe à travers le vêtement. Elle était parée d’un collier de perles en nacre. Une paire de boucles d’oreilles assorties à sa parure, un soupçon de maquillage complétait l’ensemble, un peu de rouge à lèvres à dominance rose légèrement brillante. De ravissantes bagues ornaient ses doigts et donnaient une touche de féminité indiscutable. Mon attention fut portée sur un doigt en particulier, l’annulaire de la main gauche, le doigt où l’on porte généralement une alliance, par bonheur pour moi, elle n’en portait pas. Plus rien ne s’opposait donc à commencer une cour assidue, ce que je n’allais ne pas tarder d’ailleurs à entreprendre. Cette femme me plaisait infiniment dès la première minute où je l’ai aperçue, c’était bel et bien une réalité incontestable, je ne pouvais pas ne rien faire et laisser une pareille opportunité passer, c’était du domaine de l’inconscience ou de la bêtise pure et simple. À certain moment clé de notre vie, il faut ne rien dire et laisser parler son cœur, lui seul connaît la vérité, faisons-lui confiance, on ne sera jamais déçu, il sait où il nous emmène.

 

   Pour le bas, une minijupe très courte, très sexy laissant entrevoir deux fines et longues jambes magnifiquement bronzées, le dessus de son pied laissait apparaître en toute discrétion un petit tatouage représentant une rose, une petite chaîne dorée entourait sa cheville et pour finir une paire d’escarpins à talons d’une hauteur assez imposante de couleur blanche habillait divinement ses très petits pieds eux-mêmes décoraient d’un vernis de couleur saumon, le tout représentant un ensemble plus qu’harmonieux. Elle était le charme et la grâce incarnée d’une beauté bouleversante. Elle n’avait rien d’ordinaire, elle était tout simplement exceptionnelle. Plus je la regardais plus j’étais subjugué.

 

[Ma petite voix intérieure la trouvait particulièrement canon, sexy, désirable et bien d’autre chose encore, elle me poussait à franchir tous les obstacles et à oser tout ce que l’on peut oser, en deux mots il fallait que je la séduise coûte que coûte. De toute façon avec ou sans elle, j’étais bien décidé à en découdre, à tenter ma chance, j’étais fasciné comme envoûté].

 

   Je ne pouvais m’empêcher de la contempler avec une insistance particulière, une sorte de défi à la limite de la décence, je m’étais accroché à son regard, il semblait me pénétrer si profondément, j’étais pris au piège du feu de ses yeux, j’étais en proie d’un raz-de-marée d’émotions, cette femme avec qui j’allais partager les plus beaux moments de ma vie, mais je ne le savais pas encore.

 

   Elle s’aperçut très vite de mon intérêt évident pour elle. Un peu gêné de ma hardiesse démesurée, je détournais rapidement les yeux, mais contrairement à mes craintes, elle me gratifia d’un sourire des plus timides, j’en fis de même sans me faire prier et avec grand plaisir. Mon cœur sans raison apparente palpitait déjà à sa simple vue. Il fallait bien que je me range à l'évidence, j’étais loin d’être insensible à son charme. Mon corps et mon esprit étaient en ébullition totale.

 

  Nous avions pris tous les deux un café crème, seul, tranquille, chacun de notre côté, appréciant communément ce moment de détente. Comme un reflex, il m’était impossible de faire autrement, je ne pouvais pas me résoudre à ne rien tenter, cela me paraissait inimaginable, impensable.

 

   [Ma petite voix intérieure m’invitait à réagir dans les plus brefs délais, je l’ai suivie sur ce chemin qui me paraissait quelque peu scabreux et sur ses conseils avisés de plus en plus insistants, comme si c’était elle qui allait me souffler les paroles que je devais prononcer pour cette première approche. Dieu sait que, un premier contact réussi est capital pour la suite d’une relation. Je me posais en moi-même ces questions insidieuses ; que doit-on ressentir en déposant un tendre baiser sur cette bouche qui me paraissait si sensuelle ? En caressant ce visage d’une beauté sans équivalent ? J’avais une folle envie de suivre du doigt les courbes de son visage, de son corps et bien plus encore, mon imagination n’avait plus de limite, je percevais une sorte d’emballement que j’avais le plus grand mal à réfréner. Assez réfléchi maintenant, c’est parti, je me jette à l’eau. J’ai retenu mon souffle et je me suis rendu compte aussi qu’elle me regardait droit dans les yeux avec une expression très intense, je ne pouvais pas espérer mieux… La suite des événements confirmera ou infirmera le bien-fondé de mes interprétations sur ce sujet, on verra bien !]

 

 Je ne savais pas très bien comment l’aborder. Alors j’ai engagé une conversation des plus anodines qui soit, traditionnelle déconcertante sur des banalités qui n’avait rien de géniale, mais il fallait bien que je trouve le moyen de forcer son étoile, je n’avais qu’une seule idée en tête, faire sa connaissance, cela prendra le temps qu’il faudra, j’étais extrêmement motivé, personne ni rien ne pouvaient se mettre en travers de ma route, il n’en était pas question une seule seconde. Puis de fil en aiguille, une parole en amenant une autre, je l’invitais à venir boire sa consommation à ma table. J’avais quelques appréhensions bien légitimes, je pense, celle de la peur qu’elle refusa, j’avais tort, elle accepta sans aucune hésitation. C’était parti vers de bons hospices, ma joie devait très certainement pouvoir se lire sur mon visage à ce moment précis. Nous discutions de choses et d’autres, de tout et de rien, l’atmosphère s’étant progressivement et assez rapidement détendue, je voulais que cela dure le plus longtemps possible. Nous nous sommes très vite aperçus au fil de nos conversations que nous avions énormément de similitude dans nos idées, dans notre façon de penser, tous nos échanges étaient sans a priori, sans aucune gêne, dès les premières paroles dites, comme si l’on se connaissait depuis toujours, nous nous sentions à l’aise tous les deux, nous nous regardions insidieusement dans les yeux, tout naturellement, sans pouvoir nous détacher du regard, une amitié naissait dans un premier temps et qui allait très vite se transformer en une passion dévorante. On se sentait bien, on se sentait seul au monde. Tout en conversant, je ne pouvais pas m'empêcher de dres­ser inconsciemment la liste de ses qualités, qui à première vue me semblait très nombreuses, sans fin.

 

   J’aimais l’interroger sur elle, sur son travail, sur sa vie, sur sa famille, ses amis, comme on le fait cordialement quand on se lie avec quelqu’un, les mots devenaient peu à peu réalité et elle n’avait aucune réticence à dévoiler cette partie de son intimité. Nous avons échangé nos adresses et numéros de téléphone, nous nous sommes revus pratiquement tous les jours. Ce que j’appréciais le plus, chaque matin lorsqu’on se rencontrait de nouveau, c’était nos bises quotidiennes sur les joues, c’était peu de choses en soi, mais c’était très important pour moi, je n’avais que ça à l’esprit, j’attendais ce moment avec une impatience très particulière. Ludivine aussi je pense attendait ce moment !

C’était notre seul contact physique, dans mes pensées profondes j’attendais, je souhaitais d’autres contacts plus poussés il faut dire.

 

   Puis un matin comme les autres, enfin c’est que je pensais, nos regards furent différents, je pouvais apercevoir une petite flamme naissante dans ses yeux, certainement présente dans les miens aussi.

 

   Nous étions de nouveau assis l’un en face de l’autre, sa main posée sur la table, instinctivement, sans réfléchir un seul instant, je lui ai prise, sa réponse fut immédiate, elle fit de même. Dès que nos doigts se touchèrent, un frisson étrange et grisant me parcourut en une fraction de seconde, tel un courant électrique de haut voltage. C’était la première fois que je la touchais physiquement avec des intentions nettement plus précises, puis un long silence s’installa, elle me dit ces mots que je n’oublierai jamais :

 

  - Il y a longtemps que j’attendais ce moment, j’en ai rêvé, tu sais.

  - Non je ne savais pas, je n’osais pas Ludivine.

  - Tu avais tort d’hésiter Bruno, me répliqua-t-elle spontanément. J’avais remarqué ton comportement à mon égard, il était tout, sauf anodin. Comme tu as pu le remarquer, ne me dit pas que cela t’a échappé, j’aurai un peu de mal à te croire, tu ne me laissais pas indifférente non plus, tu as su retenir mon attention aussi, c’est l’évidence même. Comment résister à ton regard ? Je te pose la question. Pour moi c’était impossible, tu vois.

 

   Nous venions de déclarer mutuellement notre flamme. Elle est venue ensuite s’asseoir à côté de moi, je lui ai effleuré délicatement son visage, passé ma main dans ses cheveux, nos lèvres se sont rapprochées, nos bouches se sont trouvées sans s'être vraiment cherchées et nous échangions notre premier véritable baiser, ma langue a caressé timidement la sienne. Ce baiser me semblait irréel, à chaque seconde qui s’écoulait, il prenait une dimension mythique comme dans certaines légendes grecques des temps anciens, nos langues se mêlèrent passionnément, fougueusement, un baiser d’une sensualité extrême, j’éprouvais en cet instant, une sensation d’une telle intensité que je n’avais jamais ressentie auparavant aussi loin que je me souvienne et pendant cet instant il n’y avait plus rien d’important que la saveur de ses lèvres. Ses mains si fines, si délicates, immobilisèrent ma tête m’emprisonnant dans ce faible espace qui nous réunissait. Ça y est nous nous sommes embrassés vraiment. Elle a détaché ses lèvres des miennes et elle m’a regardé droit dans les yeux, elle me transperçait de son regard brûlant, envahissant tout mon corps de sa chaleur. Ce baiser j’en avais tellement rêvé, puis nos lèvres se sont enhardies de nouveau, nous nous embrassions encore et encore sans pouvoir nous arrêter, sans trouver la force et le courage de dire un seul mot. Un doux frisson me parcouru de la tête aux pieds. J’étais tombé dans sa lumière, ma vie n’était plus ailleurs, je ne quitterai plus son sillage. J’étais simplement heureux, un sentiment de bien-être nous envahissait tous les deux nous étions transportés dans un monde féerique sans limite où tout était devenu possible, un de ces merveilleux moments de nos vies qui resteront gravé à tout jamais dans nos mémoires. Sa respiration haletante, son regard et ses yeux brillants étaient les signes tangibles de son intense émotion. Nous étions tombés amoureux l’un de l’autre tout naturellement, être amoureux fait partie intégrante de tous être humains ici-bas, alors pourquoi pas nous ? Nous ne dérogions donc pas à cette règle.

 

Notre attirance était réciproque, notre entente mutuelle et spontanée en tout et enfin dans la communion de nos âmes, elle prenait naissance dans nos esprits, j'en avais maintenant l’intime conviction, ce qu’elle me disait, trouvait un écho en moi. De par mon regard envers elle, elle avait deviné sans peine le trouble qu’elle faisait naître en moi et cela depuis un certain temps déjà. Mon seul but maintenant dans la vie, essayer de la rendre la plus heureuse des femmes par tous les moyens, vivre en couple, se marier, fondait une famille, être à ses côtés pour la vie, la choyer, la câliner, la protéger, les autres femmes n’existaient plus, elle les avait toutes effacées par sa simple présence. Notre premier baiser avait scellé notre destin, depuis cet instant magique elle m’avait conquise, quand elle posait les yeux sur moi, son regard n’était que pure poésie avec ses plus belles rimes, je perdais mes sens et ma raison, j’oubliais le temps, mon cœur s’enflammait de bonheur et d’émoi, nous nous aimions comme si demain n’existerait pas, sans se poser de questions, sans aucune barrière.

 

   Aucune femme ne m’avait autant troublée que Ludivine. Pourquoi ? Parce qu’elle est belle ? Intelligente ? Les deux à la fois peut-être ? Je ne comprenais rien à mes réactions irrationnelles en sa présence. Qu’est-ce qui m’arrivait ? Mon esprit flottait, il vagabondait perdu dans ses pensées. Ludivine me déstabilisait complètement. Je me sentais pousser des ailes, j’étais léger comme l’air, je vivais dans un monde dénudé de logique, irréel, une sorte de quatrième dimension, j’avais l’impression de marcher sur un nuage, chaque seconde qui passait confirmait cette vérité merveilleuse, mon univers s’était métamorphosé peu à peu et j’aimais ça. Mon seul désir était que cela ne s'arrête jamais. Plus je la connaissais et plus je l'appréciais, plus je l’aimais.

 

   Nous vivions notre douce romance, notre idylle jour après jour, sans le moindre nuage à l’horizon. Jamais encore je n’avais ressenti de façon aussi impérieuse ce besoin vital, cette attirance démesurée pour une femme, c’était beaucoup plus qu’un banal désir, je me rendis finalement compte que c’était ça l’Amour avec un grand A. Cela avait agi sur moi comme un révélateur. Son image était omniprésente dans mon esprit, dans mes pensées, dans mes rêves, quand elle n’était pas à mes côtés j’avais l’impression de manquer d’air cela avait fait toute la différence avec une relation classique, quelques minutes de retard à un rendez-vous et j’étais plongé dans la pire des angoisses qui soit. Son absence me paraissait une éternité, un enfer. C’était très inquiétant cette dépendance que je ressentais vis-à-vis d’elle.

 

   [Ma petite voix intérieure n’arrêtait pas de me répéter : « tu vois qu’est-ce que c’est bon de tomber amoureux, c’est beau, tu ne peux pas me dire le contraire n’est ce pas ! Et elle avait mille fois raison].

 

   Je t’inondais de fleurs et de cadeaux en tous genres, le soleil était au zénith dans nos cœurs. Le soir même de notre déclaration d’amour, je l’invitais au restaurant afin de fêter ce jour mémorable.

 

J’avais réservé une table à la «Liégeoise», restaurant renommé pour ses qualités culinaires et irréprochables pour son service. On s’était donné rendez-vous devant l’établissement. Quand je l’aperçus, j’avais eu quelques difficultés à la reconnaître, elle avait radicalement changé de style de vêtements, elle portait un tailleur de couleur noire, cela lui donnait l’apparence d’une femme d’affaires. Nous avons commandé notre repas, elle avait choisi comme apéritif, un cocktail portant le doux nom  « Désir d’un soir », tout un programme en soi,  en entrée une coquille saint Jacques avec une sauce à base de champagne, une blanquette de lotte en guise de plat principal accompagné d’un Chablis blanc délicieux et bien sûr un Paris Brest pour le dessert, sa pâtisserie favorite accompagnée d’une coupe de champagne Veuve Coquelicot. Moi j’avais pris une forêt noire, j’adorais le chocolat, mon péché mignon, c’était délicieux, le goût de ces petits éclats de chocolat craquant et fondant à la fois sous la dent, une agréable sensation que j’essayais de retenir dans ma bouche, ce parfum merveilleux, il me procurait un plaisir si vibrant.

 

   Le tout en discutant, elle parlait beaucoup, je buvais ses paroles, je ne me lassais pas d’écouter sa voix angélique, je lui prenais souvent sa main. Nous n’avions pas vu le temps passer, l’horloge du restaurant indiquait déjà vingt trois heures, le temps de boire un dernier café et je la raccompagnais en voiture, elle n’avait pas pris la sienne. Arrivé en bas de chez elle, elle m’invita à boire un dernier verre que j’acceptais sans hésitation bien sûr, c’était la première fois que j’allais chez elle.

 

Évidemment ce dernier verre n’était qu’un prétexte pour rester le plus longtemps possible ensemble, nous nous sommes embrassés tendrement, longuement. Je l’ai prise dans mes bras, je l’ai déshabillée pour la première fois, lentement découvrant ainsi toutes les parties les plus intimes de son corps de rêve, j’ai laissé mes  mains le caresser sans aucune retenue, je l’ai couvert de baisers plus brulant les uns que les autres sans pouvoir m’imaginer que je puisse m’arrêter ne serait-ce qu’une seule seconde. Je la désirais tellement de tout mon cœur. J’avais  envie d’elle, comme elle de moi, il se jouait entre nous une vraie symphonie du désir, même si j’essayais de contrôler la musique, j’avais l’impression de n’être qu’un instrument parmi tant d’autres entre ses mains, de me perdre dans son cœur, de me lover de plus en plus en elle pour en tirer des notes cristallines proche de la pureté du diamant, j’étais là et ailleurs en même temps aspirant à être consumé par cette mélodie à la fois profonde et poignante qui s’élevait de cette mer démontée, de cette vague de désir qui s’était emparée de nous, nous avions le pouvoir de faire résonner nos corps en caressant les bons endroits qu’une certaine morale réprouvait, mais pas nous et nous nous sommes aimés avec une passion dévorante et je n’ai quitté son appartement que le lendemain matin vers les dix heures. J’avais vécu ces moments inoubliables de ma vie comme un paradis sur terre. Je n’avais jamais imaginé que cela puisse m’arriver un jour. Comme dans la chanson d’un célèbre acteur de cinéma français « On ne sait jamais le bruit, la couleur des choses ».

                                                                                                                                  

    Pour plus de bonheur encore, vers la mi-octobre Ludivine m’annonça :

 

    - j’ai de fortes présomptions, tout me laisse à penser que je suis enceinte, je te le confirmerai dès que j’en serai absolument certaine.

 

    Impatient évidemment de savoir, je lui demandais tous les jours, espérant bien sûr une ré­ponse positive de sa part, puis arriva le jour, l’heure, la mi­nute tant attendue. Elle m’apprenait enfin qu’elle attendait cet heureux événement et que ce sera une fille, nous étions remplis d’une joie immense, indescriptible, c’était le plus beau jour de ma vie, c’était le plus beau cadeau qu’elle pouvait me faire. Ludivine était la plus heureuse des femmes de devenir maman pour la pre­mière fois et de m’apprendre cette bonne nouvelle. Elle en informa ses parents, ses amies, ce qui faisait pas mal de monde, ils étaient tous ravis pour nous.

 

  Dans notre euphorie, nous avions déjà choisi son prénom « Catherina ou Nathalie » on ne savait pas trop, on était indécis, j’étais fou de joie, fille ou garçon cela n’avait que peu d’importance, mais j’avoue à demi-mot que j’avais une légère préférence pour une fille. Je l’accompagnais évidemment dans toutes ses démarches médicales comme il se doit. Je prenais mon futur rôle de père et de mari très au sérieux, prendre soin d’elle était maintenant ma seule préoccupation.

 

  On avait un nouveau but de promenade dorénavant, visiter les magasins spécialisés genres « Natalys » simplement pour regarder. Ludivine était cette éblouissante étoile qui enjolivait de nouveau ma vie après la triste période de décès qui avait décimé ma famille. Ses yeux avaient la couleur du saphir, j’y voyais le reflet de notre amour, elle m’avait ouvert les portes de son paradis, de son jardin secret, à mes yeux elle était un être précieux et rare doté de qualité dont je ne soupçonnais pas encore l’existence. Nous avions l’impression de vivre un rêve.

 

   Pendant la période estivale, quand la météo le permettait, en début de soirée, après notre travail, on se retrouvait, impatient tous les deux à vivre ce moment privilégié, on faisait de longues balades sur la digue promenade de Wimereux ou d’Hardelot selon notre humeur, je lui tenais la main le plus souvent ou bien je la passais autour de sa taille, on se reposait de temps en temps sur les bancs de pierre qui bordaient le long du parapet. Je passais mon bras autour de son cou, elle mettait sa tête sur mon épaule, nos regards se croisaient longuement, on s’embrassait tendrement, on ne pensait plus à rien, rien qu’à nous, savourant l’instant présent, on écoutait le bruit de la mer, les vagues se fracassant contre les rochers, les enfants qui criaient, qui jouaient, ils nous faisaient penser à notre future fille qui décuplait à l’infini notre joie, notre bonheur. Quand l’envie de nous aimer était trop forte et c’était très fréquent, nous prenions une chambre à l’hôtel de la mer, il était sur notre chemin et nous faisions l’amour, on ne pouvait pas résister, c’était plus fort que nous, on ne contrôlait plus rien, j’aimais tellement la toucher, la caresser, l’embrasser. Quand nos deux corps ne faisant plus qu’un, à l’ instant où notre plaisir et notre bonheur étaient à son paroxysme, enlacer ensemble l’un contre l’autre souvent après, on s’endormait paisiblement, on allait diner au restaurant de l’hôtel et on y passait la nuit, nous étions envahis tous les deux d’une sensation de bien-être, on aimait savourer cette plénitude que nos corps nous procuraient.

 

 Il y avait aussi nos flâneries presque quotidiennes après notre repas du midi, avant de reprendre chacun notre travail, on déambulait dans les jardins de la haute ville, sur les remparts, entourant la vieille ville fortifiée, profitant d’un rayon de soleil qui nous réchauffait le cœur et l’âme. Nous étions en automne, cette saison de l'année, celle qui était de loin ma préférence, elle étalait dans toute sa splendeur son manteau étincelant de ses couleurs les plus vives, les plus variées, les arbres hésitaient entre le vert et le jaune, un déploiement de teintes et d'odeurs puisées dans les incroyables ressources de la terre. Senteur de champignons, de fougères et de feuilles mortes sèches craquant sous les pas des promeneurs, des instants magiques, des silences paisibles, délicats timidement troublés par le murmure du vent, le bruissement des arbres, le frottement des branches les unes sur les autres me faisait penser à un monde féerique. L’automne est une époque propice à toutes sortes de rêveries. Dans ce cadre merveilleux et cette lumière limpide, combien de fois nous nous sommes surpris Ludivine et moi main dans la main profitant de tout et élaborant des projets qui nous tenaient à cœur en vue de notre avenir si prometteur, dans cet environnement hors du commun, dans ce décor fantasmagorique. Dommage que malgré toute cette beauté qui nous entourait soit les prémices d’un froid maléfique, le temps deviendra rude. Allons-nous comme les arbres, nous dévêtir de tout sans pudeur et frissonner sous cette agréable fraicheur, ce léger souffle d’air qui caressait délicatement notre peau et qui nous envahissait complètement. J’avais toujours en moi cette crainte inexpliquée, cette peur que tout s’arrête au sommet de nos baisers endiablés.

 

   Nous avions décidé de vivre ensemble, comme tout nous réunissait et nous avions estimé que nous nous étions assez familiarisés ensemble pour franchir ce pas décisif. Et en plus nous avions de plus en plus de mal à nous séparer. Le fait de nous retrouver seul chacun dans notre appartement, le vide que cela engendrait était devenu insupportable, il suffisait que je pense à Ludivine pour la voir se matérialiser dans mon appartement. D’ailleurs, quand nous nous retrouvions tous les deux à n’importe quelle heure de la journée, nous ne perdions pas une minute pour nous jeter dans les bras de l’un l’autre avec une impatience qui ne semblait ne pas décroître avec le temps. Peu de temps après, j’emménageais chez elle, c’était sa volonté, je lui avais proposé de venir plutôt chez moi, mais elle préféra l’inverse, je me suis rangé à son avis. Elle habitait un très joli petit appartement au troisième étage d’une résidence située Boulevard Sainte-Beuve en bordure de mer, très ensoleillé et très bien décoré par rapport au mien, on percevait très nettement une touche féminine indiscutable dans la déco­ration, tout était bien rangé, chaque chose était sa place.

 

    Elle passait, tout comme moi beaucoup de temps dans la salle de bain afin de se préparer :

   -  pour me faire belle et que tu sois fière de moi, me disait-elle, je lui répondais :

   -  tu sais que je t’aime comme tu es, tu es déjà si belle à mes yeux, mon amour pour toi est inconditionnel et sans limite, ne change surtout pas, tout est si bien chez toi, je t’aime mon amour.

 

Elle me souriait et m’embrassait si tendrement, elle me faisait fondre de bonheur. Elle aimait se délasser longuement dans un bain parfumé d'huile rare qui donnait à sa peau ambrée la douceur de la soie.

 

   J’adorais caresser son visage, passer ma main délicatement dans ses cheveux, l’embrasser tendrement dans le cou, lui mordiller le lobe de son oreille, des caresses simples, que Ludivine appréciait, j’aimais aussi croiser intensément et longuement son regard. Les mots, entre nous étaient presque devenus inutiles, tellement nous étions proches l’un de l’autre. Les mots que nous échangions étaient remplis de douceur, d’amour et de tendresse, nos mots étaient si bien choisis qu’ils se suffisaient à eux-mêmes pour qu’on les aime. A certain moment clé de notre vie, nos silences complices valaient autant que des paroles qui n’auraient certainement pas mieux exprimées ces merveilleux instants de bonheurs partagés de notre existence. Nos simples échanges de regards étaient devenus comme de véritables miroirs, il y avait une douceur infinie dans la façon de nous regarder. Son esprit, ses pensées, aussi beau que son corps, d’une beauté majestueuse, digne d’une princesse des mille et une nuits, tout en elle était sublime. Pourrais-je jamais me rassasier un jour de cette femme.

 

Les méandres de la vie me l’avaient mis sur ma route, je pris conscience de cette inestimable chance, même si cela n’a été que de courte durée. En ce qui me concerne, je n’ai jamais cru au hasard, mais au destin qui nous a permis de nous rencontrer, de nous aimer. Dans la vie, il ne faut garder que le meilleur, car c’est cela qui nous enrichit et nous fera progresser, ce passage de ma vie, cette femme m’a apporté énormément, cette leçon de vie, pour rien au monde, je n’aurais voulu passer à côté. Tu as été cette femme qui m’a offert les plus beaux jours, les plus belles images, les plus beaux rêves de ma vie, merci à toi et de toi seule Ludivine.



17/10/2017
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